SOS Médecins France reste sur ses gardes !
La Fédération SOS Médecins France a pris connaissance du rapport « Pour un Pacte de Refondation des Urgences » de messieurs Thomas Mesnier et Pierre Carli rendu public le 19 décembre dernier.
Comme vous le savez, la Fédération et ses 1 300 médecins urgentistes se sont mobilisés dès l’annonce du Pacte de refondation des urgences en septembre par la ministre des Solidarités et de la Santé Agnès Buzyn, pour contribuer à la mise en place d’un modèle capable de répondre à la demande urgente d’un meilleur accès aux soins.
Or, à la lecture dudit rapport et tout particulièrement du tome 2 concernant la création d’un service d’accès aux soins (SAS), SOS Médecins France, premier réseau d’urgence et de permanence de soins en France, s’étonne encore de se voir marginalisée et si peu écoutée.
A titre d’exemple, il est mentionné dans le cadre de la régulation des appels d’urgence que l’opérateur de SOS Médecins « n’a pas de rôle de tri mais se contente de prendre les coordonnées de l’appelant afin de transmettre l’appel, dans l’ordre d’arrivée, à un médecin régulateur. Le patient présentant une urgence avérée ou potentielle aura donc une perte de temps avant la qualification de son appel par un médecin et donc potentiellement une perte de chance ». Cette affirmation est erronée et témoigne une nouvelle fois d’une méconnaissance profonde de ce qu’est et fait SOS Médecins depuis plus de 50 ans France. On rappelle ici que SOS Médecins a régulé en 2019 6,3 millions d’appel qui ont abouti à la réalisation de 4,3 millions d’actes.
Il est d’ailleurs relaté la visite de la Plateforme d’Appels d’Urgence de Paris (PFAU) mais à aucun moment, il a été jugé bon par les auteurs du rapport de visiter ou/et de relater le fonctionnement des plateformes de régulation de SOS Médecins.
Ce rapport promeut ainsi l’idée d’un changement de paradigme concernant la régulation en France. On parle ainsi d’un « superviseur » et de « régulation déportée » et c’est ce que nous faisons dans nos structures au jour le jour depuis un demi siècle avec nos 63 associations. Il est donc regrettable que l’expérience de SOS Médecins en la matière soit si peu plébiscitée.
- Sur le SAS et le principe du guichet unique
La première partie du tome 2 explique qu’« avant de définir ce que sera le service d’accès aux soins, il convient de déterminer ce qu’il ne sera pas. Il ne substitue en aucun cas à la médecine de premier recours, à la médecine générale ou aux autres numéros d’accès aux soins non programmés tels que l’appel vers des maisons médicales de garde ou l’appel vers des maisons pluridisciplinaires de santé structurées ou l’appel vers d’autres structures. ».
Or, il est écrit plus loin que « le principe retenu par la mission est celui d’un point d’entrée unique ou guichet unique, qui délivrerait la réponse appropriée à une situation de soins non programmés, allant de l’urgence médicale au conseil, à la téléconsultation, à l’orientation vers une structure de soins ou une prise de rendez-vous » qui reposerait sur un numéro bien identifié que les auteurs ont dénommé « 113 ». La Fédération SOS Médecins France doit-elle comprendre que l’existant servira de marchepied pour la mise en place d’un guichet unique dont elle sera exclue à terme ?
Les 63 associations SOS Médecins ont pu lire également « Ceci se traduit obligatoirement par un niveau de confiance de cette nouvelle offre de soins reposant sur un guichet unique, par l’abandon d’un certain nombre de numéros de téléphone : le 15 devra disparaître au profit du numéro unique santé, le 116 117 ou les numéros de téléphone dédiés à la permanence de soins ambulatoires devront également disparaître au profit du numéro unique santé. ». Nous rappelons que la Fédération SOS Médecins France et ses 63 associations ne dérogent pas au maintien de l’accès direct à leur régulation et à leurs structures et par conséquent le maintien du numéro national 3624 et les numéros d’accès directs à leurs centres d’appels.
Les rapporteurs déclarent également « Le principe initial est une modification de paradigme permettant de considérer un véritable continuum dans cette prise en charge et d’oublier le principe de permanence de soins, totalement différencié de l’organisation diurne, pour aller vers le concept global de prise en charge des demandes de soins non programmés ; la permanence de soins bien entendu s’intègre dans ce dispositif, elle est d’ores et déjà organisée et financée ». Pour SOS Médecins, cette phrase résume toute l’ambiguïté de ce rapport qui fait et défait les concepts « en même temps ».
- Le déploiement du SAS
A la lecture du rapport, nous comprenons que le développement et le déploiement du SAS se fera en majorité par le biais des CPTS. Or la couverture actuelle du territoire est encore embryonnaire et cela prendra plusieurs années pour que celle-ci soit pleinement opérationnelle. Nous rappelons que la Fédération SOS Médecins France recommande, depuis le départ, de s’appuyer sur l’existant et sur ceux qui font le travail au quotidien des soins non programmés. Nous nous demandons donc où est
la réflexion et le bon sens qui supposaient devoir se baser sur l’existant pour déployer rapidement un système efficace pour améliorer l’accès aux soins ?
- Les effecteurs et leur financement
A aucun moment, il n’est question des effecteurs de terrain et de la visite à domicile alors même qu’à notre sens, c’est tout l’enjeu de la crise que nous traversons dont la solution consiste à mettre plus de médecins face à des patients.
Il est fait par ailleurs notion d’un principe de subsidiarité au médecin traitant pour ne pas déresponsabiliser la première ligne et dans un souci de prévention et de santé publique. On articule ainsi toujours les réflexions autour du médecin traitant, ce que nous entendons, mais alors que doivent faire et que feront les patients qui n’ont plus de médecin traitant ? Et qu’elle valorisation pour les médecins effecteurs de terrain ?
On projette de financer des transports pour adresser les patients dans des structures de soins et on ne parle pas de valorisation de la visite à domicile, pourtant le gouvernement plébiscite en même temps le virage ambulatoire et le maintien à domicile où le médecin a un rôle clé.
Concernant le SAS, la mise en place de la plate-forme est estimée entre 78 et 96 millions d’euros. Le budget annuel de fonctionnement est estimé entre 160 et 208 millions d’euros pour l’hôpital et l’ambulatoire. On remarque tout de même qu’un petit paragraphe est réservé au financement des effecteurs. Ce financement sera effectué au forfait mais il semblerait qu’il n’a pas été chiffré avec un financement au forfait des agendas partagés. Ainsi, comme trop souvent d’ailleurs, le financement des effecteurs semble avoir été oublié.
Conclusion
SOS Médecins France a attiré à plusieurs reprises l’attention de la Ministre et l’équipe projet en charge d’imaginer le SAS, sur le risque de créer un nouvel « ogre » administratif, parfait sur le papier, mais inefficace dans la réalité. A la lecture du rapport, il semble malheureusement que nous en prenions le chemin.
Pour SOS Médecins, ce qui permettra de faire face à la demande urgente et nécessaire pour un meilleur accès aux soins, ce sont les structures efficientes, capables de mobiliser les médecins sur le terrain pour aller à la rencontre des patients : en consultation, en visite à domicile et en télémédecine.
« Il faut faire très attention au risque d’ajouter une couche bureaucratique supplémentaire et inutile, qui irait à l’encontre de l’objectif de la ministre de renforcer la qualité et la rapidité des prises en charge des patients. » Pierre-Henry Juan, président de SOS Médecins.
Ainsi, suite à la lecture de ce rapport, la Fédération SOS Médecins France reste très dubitative sur les délais annoncés, en colère face à la méconnaissance de SOS Médecins par les auteurs et extrêmement vigilante aux éventuelles suites qui seraient données à ce rapport.
A propos de SOS Médecins France :
SOS MEDECINS FRANCE est une fédération qui rassemble 63 associations autour d’un objectif commun : le développement d’un réseau de permanence de soins et de soins non programmés en France dans un esprit de coopération et de service à la population.
SOS MÉDECINS FRANCE est le premier réseau d’urgence et de permanence de soins en France :
- 6,3 millions d’appels traités
- 2,6 millions de visites à domicile
- 1,1 million de consultation
- Une disponibilité des équipes 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7
- 1 300 médecins partout en France
- 63 associations réparties sur le territoire (métropole et outre-mer)